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INTERVIEW DE CAROLINE DUMOND PAR LA CAISSE D'EPARGNE

Quelle définition peut-on donner d’une entreprise innovante ?

Caroline Dumond : Le terme « innovation » est trop souvent encore assimilé à l’innovation technologique : on aime notamment compter le nombre de brevets déposés par une société ou un pays… Une entreprise innovante est une entreprise dont la stratégie, le fondement de son offre ou une des clés de sa compétitivité, s’adaptent aux évolutions de son marché pour devenir ou rester compétitif. On comprend alors que l’innovation a une profondeur de champ qui va de l’incrémentation (processus continu qui améliore l’existant) jusqu’à la disruption (rupture avec le modèle existant). On retient plus facilement l’innovation disruptive car elle apporte un renouveau total sur un marché : par exemple, les plateformes de crowdfunding ont radicalement réinventé le financement, entraînant même l’émergence d’un troisième marché boursier où l’on peut aujourd’hui acheter des parts d’entreprise.


Ces deux modèles d’innovation ont-ils des problématiques de financement similaires ?

Caroline Dumond : L’innovation incrémentale est beaucoup plus facilement finançable. On se focalise sur l’amélioration de la proposition de valeur sur tel ou tel critère, pour l’adapter à ses clients et au marché : tout est orienté vers le client existant selon des business models connus. C’est assez rassurant pour les financeurs. Quand cette innovation incrémentale est réalisée dans le domaine technologique, on a en prime l’avantage que les investissements technologiques les plus coûteux ont déjà été effectués par les disrupteurs.

L’innovation disruptive est basée sur un changement radical de proposition de valeur : on jette les études de marché existantes, on change de terrain de jeu… Et de profil clients : ceux qui achètent aujourd’hui ne sont pas ceux de demain. Donc on fait un pari sur l’avenir. C’est la raison majeure qui fait que l’innovation de rupture est plus difficilement finançable : on invente, ou pas, le business model de demain. Le second frein est ce fameux focus sur l’innovation technologique, qui est plus facilement palpable pour des financeurs de la disruption.

Cela a longtemps eu pour effet de stériliser l’ambition d’innover de toute une population, qui ne se sentait pas forcément compétente sur le plan technologique, tout en ayant peut-être de très bonnes idées pour des innovations non technologiques. En prime, la communication actuelle autour des levées de fonds qui accompagne l’innovation, mais aussi l’énergie et le temps qu’il faut y consacrer, font parfois perdre de vue l’essentiel : trouver son client et vendre son concept !


BPI France distingue 6 piliers de l’innovation. Pouvez-vous les décrypter pour nous ?

Caroline Dumond : Le Guide Innovation nouvelle génération édité par BPI France est très intéressant car il présente cette différentiation de profondeur de champ et les « success story » qui les illustrent sans critère de valeur d’innovation. Il reconnait 6 dimensions de l’innovation, qui peuvent se compléter les unes les autres et qui donnent enfin la part belle à des innovations non technologiques.

On retrouve : 1. L’innovation marketing & commerciale qui change la présentation, la distribution, la tarification, la promotion de l’offre... Comme l’a fait par exemple la marque Michel & Augustin.

2. L’innovation de produit, service et usage qui améliore les produits/services, en introduit de nouveaux ou leur permet un nouvel usage parfois inattendu.

3. L’innovation de procédé et d’organisation, qui change la manière dont l’entreprise organise son travail et sa chaîne logistique. Exemple : les corners de Daily Sushi dans les supermarchés.

4. L’innovation de modèle d’affaires qui réorganise la structure des coûts ou des revenus. Par exemple en réinventant la façon de créer de la valeur avec quelque chose qui existe déjà, comme les applis de co-voiturage pour l’autostop ou les plateformes de commerce événementiel pour les soldes et ventes privées.

5. L’innovation sociale qui répond à des objectifs RSE tant sur les buts que les modalités. Elle produit, distribue ou commercialise différemment, mais aussi organise la gouvernance et partage la valeur ajoutée selon de nouvelles règles. L’exemple type : « la Ruche qui dit Oui » avec ses communautés locales qui organisent les marchés de proximité.

6. Et bien sûr, l’innovation technologique qui crée ou intègre une ou plusieurs nouvelles technologies. Oui, c’est notamment le numérique, mais pas que.

7. Enfin, cette grande diversité des options d’innovation ne s’arrête pas là : on peut les mixer. Je suis convaincue que c’est dans la conjugaison de plusieurs dimensions de l’innovation que l’on trouvera les initiatives les plus porteuses… !

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